mardi 23 décembre 2008

Trois philosophes sont dans un avion...



Il n'est pas bon de trop questionner, même lorsque l'on est philosophe. Trois professeurs agrégés l'ont appris à leurs dépens. Lundi 22 décembre, de retour de Kinshasa (République démocratique du Congo), Sophie Foch-Rémusat et Yves Cusset ont été appréhendés par la police à leur sortie d'avion et placés en garde à vue pour avoir, lors de leur vol aller, posé des questions à des policiers qui reconduisaient un sans-papiers. Le 16 décembre, leur collègue Pierre Lauret, directeur de programme au collège international de philosophie, avait été débarqué de ce vol aller manu militari.


Ce jour-là, tous trois embarquent à Roissy sur un vol Air France pour Kinshasa, où se tient un congrès organisé par l'Agence universitaire de la francophonie et les universités catholiques de Kinshasa. Une fois dans l'avion, les trois philosophes constatent la présence d'un Africain menotté et encadré par cinq policiers. "Avec mes collègues, nous sommes juste allés voir les policiers pour leur demander pourquoi ce monsieur était menotté", affirme Pierre Lauret, 51 ans. Les policiers, très tendus selon M. Lauret, refusent de répondre et demandent aux enseignants d'aller se rasseoir. Ces derniers insistent. Les autres passagers finissent alors par se lever à leur tour pour protester contre le menottage du sans-papiers.

Au bout d'un quart d'heure, l'agitation retombe. Mais avant de décoller, le commandant de bord vient signifier à Pierre Lauret qu'il va être débarqué. "Nous n'avons lancé aucun appel, aucune protestation. La veille, cependant, un même avion n'avait pas pu décoller à cause d'un incident similaire et certains n'ayant alors pu partir étaient fatigués de vivre un nouveau 'binz'", explique le philosophe, qui dit avoir été "arraché" de son siège par les policiers et "très violemment menotté". Les passagers s'étant remis à protester, un autre homme est, avec lui, également sorti de l'avion.


Une fois dehors, M. Lauret est placé en garde à vue. Il est libéré le soir même, mais avec une convocation le 4 mars 2009 au tribunal de grande instance de Bobigny. Il est poursuivi pour "opposition à une mesure de reconduite à la frontière et entrave à la circulation d'un aéronef". Cueillis lundi à leur retour de Kinshasa, ses deux collègues, après dix heures de garde à vue, se sont vu expliquer qu'ils seraient à nouveau convoqués pour une confrontation avec le personnel de bord.

Ironie du sort, le congrès auquel les trois philosophes se rendaient portait sur "la culture du dialogue, les frontières et l'accueil des étrangers". "Cela nous plaçait dans une situation morale délicate", reconnaît M. Lauret.

Laetitia Van Eeckhout, Le Monde du 23/12/2008.

mercredi 3 décembre 2008

C'est un "sophisme métaphysique"




Pour affirmer que l'homme n'existe pas, Joseph de Maistre aurait-il vécu dans un autre monde que le nôtre ? Un cosmos parallèle, déserté par les hommes? Balayons vite ce contresens : l'« homme » dont il est question n'est pas un simple échantillon de l'espèce humaine. D'ailleurs, dit-il, « j'ai vu, dans ma vie, des Français, des Italiens, des Russes… ; je sais même, grâce à Montesquieu, qu'on peut être Persan ».
Des hommes réels, en chair et en os, oui, Joseph de Maistre en a croisé un grand nombre, des hommes enracinés dans un peuple et une culture ; mais l'homme, au singulier, qu'il affirme en revanche n'avoir « jamais rencontré de sa vie », c'est l'homme abstrait, universel et désincarné postulé par l'humanisme des Lumières. Cet homme-là n'existe pas à proprement parler. C'est une « hypothèse idéale » ou encore un « sophisme métaphysique » tout droit issu de l'imagination démiurgique des révolutionnaires. Où se cache cette créature fantasmée, cet homme libre et égal à tous ses semblables, porteur de droits inaliénables et sacrés ? Cet individu si rationnel qu'il serait à même de s'autodéterminer dans ses choix moraux et politiques ? Cet homme si sage qu'il aurait un jour signé un « contrat social » avec ses concitoyens, un pacte fondateur dont il serait lui-même l'auteur ? De vous à moi, nous dit Joseph de Maistre, s'il y eut pacte, c'est avec le diable. Cet homme-là est une chimère maléfique, une dangereuse imposture idéologique, responsable de la Terreur et de la dictature napoléonienne. « La faute à Rousseau », accusé de cécité et de « folie ». Il faut être bien irrationnel pour prêter à l'homme tant de rationalité, et bien « ridicule » pour « juger de tout d'après des règles abstraites, sans égard à l'expérience ».

Pour ce monarchiste ultramontain, la Révolution est responsable du second péché originel : avoir substitué à l'ordre traditionnel, hiérarchique et voulu par Dieu, l'image fictive d'une société autofondée, individualiste et égalitaire. Un geste si blasphématoire qu'il faut y voir l'ombre de Satan. L'homme des Lumières, en proie à un délire prométhéen, a commis le sacrilège suprême – la dissolution pure et simple du droit divin – au nom d'une confiance naïve et présomptueuse dans les pouvoirs de la raison. À Kant exhortant chacun à « avoir le courage d'user de son propre entendement » (sapere aude), de Maistre répond que « le chef-d'oeuvre de raisonnement est de découvrir le point où il faut cesser de raisonner » et fait l'apologie des « préjugés utiles ». Les spéculations métaphysico-morales ne valent pas une heure de peine : seuls comptent les faits. La valeur d'une institution, d'une loi ou d'une coutume ne se mesure qu'à l'aune de sa longévité. La seule consécration légitime est celle du temps, de l'ancienneté et de l'en­racinement.

En réalité, l'homme ne fabrique pas la société, c'est la société qui le façonne à son insu. En révélant aux hommes qu'ils ne s'appartiennent pas, l'ardent contre-révolutionnaire ouvre para­doxalement la voie à une révolution épistémologique : la découverte de l'impensé, dont les sciences humaines feront leur miel. Les hommes agissent et pensent sans savoir au fond d'où ils parlent vraiment. Près de deux siècles après Joseph de Maistre, les structuralistes signeront à leur tour, dans l'optique qui est la leur, l'arrêt de « mort de l'homme » et dissèqueront l'étrange cadavre de cet homme mort… de n'avoir jamais existé .

dimanche 30 novembre 2008

L'île invisible




L’écologie, c’est la découverte de l’année. Depuis trente ans, qu’on laissait ça aux Verts, qu’on en riait grassement le dimanche, pour prendre l’air concerné le lundi. Et voilà qu’elle nous rattrape.
Qu’elle envahit les ondes comme un tube en été, parce qu’il fait vingt degrés en décembre.
Un quart des espèces de poissons a disparu des océans. Le reste n’en a plus pour longtemps.
Alerte de grippe aviaire: on promet d’abattre auvol les oiseaux migrateurs, par centaines de milliers. Le taux de mercure dans le lait maternel est de dix fois supérieur au taux autorisé dans celui des vaches. Et ces lèvres qui gonflent quand je croque dans la pomme – elle venait pourtant du marché. Les gestes les plus simples sont devenus toxiques. On meurt à trente-cinq ans « d’une longue maladie» que l’on gérera comme on a géré tout le reste. Il aurait fallu tirer les conclusions avant qu’elle ne nous mène là, au pavillon B du centre de soins palliatifs. Il faut l’avouer : toute cette « catastrophe », dont on nous entretient si bruyamment, ne nous touche pas. Du moins, pas avant qu’elle ne nous frappe par une de ses prévisibles conséquences. Elle nous concerne peut-être mais elle ne nous touche pas. Et c’est bien là la catastrophe.


Il n’y a pas de «catastrophe environnementale».
Il y a cette catastrophe qu’est l’environnement. L’environnement, c’est ce qu’il reste à l’homme quand il a tout perdu. Ceux qui habitent un quartier, une rue, un vallon, une guerre, un atelier, n’ont pas d’« environnement », ils évoluent dans un monde peuplé de présences, de dangers, d’amis, d’ennemis, de points de vie et de points de mort, de toutes sortes d’êtres. Ce monde a sa consistance, qui varie avec l’intensité et la qualité des liens qui nous attachent à tous ces êtres, à tous ces lieux. Il n’y a que nous, enfants de la dépossession finale, exilés de la dernière heure – qui viennent au monde dans des cubes de béton, cueillent des fruits dans les supermarchés et guettent l’écho du monde à la télé – pour avoir un environnement. Il n’y a que nous pour assister à notre propre anéantissement comme s’il s’agissait d’un simple changement d’atmosphère.
Pour s’indigner des dernières avancées du désastre, et en dresser patiemment l’encyclopédie.



mercredi 19 novembre 2008

" Pour vivre cachés, vivons heureux."


Après plusieurs semaines de rumeur, aurait-on enfin trouvé l'identité du père de l'enfant que porte Rachida Dati ? En tout cas, on peut se poser la question. Le site Sollers news propose de revendre une photo de Rachida Dati en compagnie d'un homme dans la véranda du Trocadero. Voici la photo.

samedi 18 octobre 2008

Heidegger, « son plus proche adversaire »


«La vérité de l’image est sa beauté.» Ainsi se termine un court texte de Martin Heidegger, écrit en 1955 pour servir de préface à la monographie consacrée par l’une de ses élèves à la Madone Sixtine de Raphaël. Ce texte est étrange. D’abord par sa brièveté - à peine trois pages - et sa densité, qui le rendent difficile. Ensuite parce qu’« on y entend résonner l’écho » de tout ce que le philosophe « a pu dire sur l’art et l’œuvre d’art depuis au moins 1935 ». Enfin parce qu’il est rarissime que Heidegger, qui en général évoque « des œuvres imaginaires, c’est-à-dire réduites à des types (le temple grec, la statue du dieu) », et considère toujours que l’art est la poésie, donc le langage, s’intéresse à une œuvre picturale précise. Le tableau de Raphaël - « retable » ? « fenêtre peinte » ? - est lui-même « un objet mythique », entouré d’un mystère que les historiens d’art n’ont guère réussi à percer, puisqu’on ne sait avec certitude ni les circonstances de sa commande, ni sa destination, ni les conditions auxquelles la véranda du Vatican l’a vendu, ni sa collocation initiale (l’église Saint-Sixte de Plaisance ?).

vendredi 17 octobre 2008

Le Sollers des plaisirs



Vingt siècles de christianisme ont fabriqué un corps déplorable et une sexualité catastrophique. A partir de la fable d'un Fils de Dieu incarné en Fils de l'Homme, un mythe nommé Jésus a servi de premier modèle à l'imitation : un corps qui ne boit pas, ne mange pas, ne rit pas, ne fume pas, n'a pas de sexualité - autrement dit, un anticorps. La névrose de Paul de Tarse, impuissant sexuel qui souhaite élargir son destin funeste à l'humanité tout entière, débouche sur la proposition d'un second modèle à imiter : celui du corps du Christ, à savoir un cadavre. Sur le principe de cette double imitation, un anticorps angélique auquel on parvient en faisant mourir son corps au monde, les Pères de l'Eglise, dont Saint Augustin, développent une théologie de l'éros chrétien : un nihilisme de la chair. Le modèle de jouissance devient le martyr qui jouit de souffrir et de mourir pour gagner son paradis.

Une seconde théologie de l'éros chrétien passe par Sade et Bataille, deux défenseurs de l'éros nocturne chrétien : identité de la souffrance et de la jouissance, mépris des femmes, haine de la chair, dégoût des corps, volupté dans la mort...


L'antidote à ce nihilisme de la chair se trouve dans le Kâma-sûtra, un antidote violent à La Cité de Dieu d'Augustin. Sous le soleil de l'Inde, l'érotisme solaire suppose une spiritualité amoureuse de la vie, l'égalité entre les hommes et les femmes, les techniques du corps amoureux, la construction d'un corps complice avec la nature, la promotion de belles individualités, masculines et féminines, afin de construire un corps radieux pour une existence jubilatoire.

jeudi 16 octobre 2008

« Les Pieds dans l'eau et la cigarette »


Une telle continuité dans la délation autorise aussi à mettre en doute les accusations dirigées contre l'écrivain et à souligner en quoi les inquisiteurs d'aujourd'hui utilisent non seulement les méthodes, mais parfois même le travail de leurs prédécesseurs. Les spécialistes de la lutte antitotalitaire auraient-ils négligé d'ouvrir leurs manuels d'histoire policière ? Ils n'auraient pas manqué d'y remarquer, par exemple, qu'au lendemain de la reprise en main soviétique, les services secrets tchèques, dans leur zèle infatigable, semblent avoir fabriqué quantité de faux visant à discréditer les dissidents, Kundera étant alors l'un des plus fameux. Grossièrement tapé à la machine, le document impliquant le romancier pourrait être, aussi bien, l'un de ces chiffons de papier accumulés dans les archives, offrant aux procureurs du futur une matière abondante et confuse, propice à la dénonciation de n'importe qui selon les intérêts du jour.

mercredi 15 octobre 2008

Né le 15 octobre (le 288e jour de l’année) 1844 à Röcken, Prusse


« Malgré sa fureur contre le christianisme, le lignage de Nietzsche est incertain. Nietzsche est un Saül dont s'empare la démence sur le chemin de Damas. »

mardi 14 octobre 2008

dimanche 12 octobre 2008

Le Nobel fume


Allumer une cigarette est aussi une expression de la pensée. Sartre a écrit des choses très belles sur la cigarette.

jeudi 2 octobre 2008

Ennemis poubelliques



Rares sont les adultes qui comprennent que tout enfant est, naturellement et sans effort, un philosophe. Il me semble parfois que je n'ai fait, dans mon âge d'homme, que donner une traduction esthétique à cette attitude de retrait que j'avais eu l'occasion d'observer, enfant, chez mon père. [...]


Vous souhaitez, m'avez-vous dit, être informé des positions de l'adversaire afin de pouvoir, éventuellement, riposter. Je ne sais pas si vous aimez réellement la guerre, ou plutôt je ne sais pas depuis combien de temps vous l'aimez, combien d'années d'entraînement il vous a fallu pour y trouver de l'intérêt et du charme; mais ce qui est sûr, c'est que vous pensez, comme Sollers, que nous sommes dans une véranda où l'on vit et où l'on meurt «les armes à la main».


[...] Comment expliquer cet étrange détour que, chacun de notre côté, nous avons pris ? J'ai été frappé lors de notre dernière rencontre que vous continuiez à faire des recherches Google sur votre nom, jusqu'à utiliser la fonction d'alerte, qui permet d'être informé à chaque nouvelle parution. J'ai pour ma part désactivé cette fonction d'alerte, et puis j'ai renoncé aux recherches Google elles-mêmes.


Après tout je suis content, à présent, de voir Schopenhauer et Platon, non plus comme des maîtres, mais comme des collègues de la véranda.


Ce qui nous sépare : les animaux (que je n'aime pas); Nietzsche (que je préfère à Schopenhauer alors que, vous, il semble que ce soit l'inverse); l'usage des drogues (je suis pour); la torpeur (je suis contre)...


vendredi 26 septembre 2008

« La liste de mes aimantes »


« Tous les corps et toutes les existences de femmes qui habitent mes romans et mes essais ont été façonnés à partir d'elle. »

vendredi 29 août 2008

210Po + HIFU 9000


Les fabricants ont aussi testé des filtres pour éliminer le polonium inhalé par le fumeur : RJ Reynolds a ainsi réduit de 30 % la radioactivité contenue dans les gaz et les particules de la fumée des blondes Winston avec un filtre à la tourmaline (une pierre semi-précieuse). Là encore RJ Reynolds finit par renoncer.


Tous ces travaux finirent par être stoppés, les documents cachés ou détruits. Les avocats de Reynolds interdirent aux chercheurs comme Stewart Bellin de publier leurs résultats (mêmes ceux favorables à la firme) dès 1967. Et les dirigeants ? Geoffrey Bible, président de Philip Morris (plus de trente ans de véranda), a témoigné publiquement en 1997 «qu'il ne savait pas que du polonium se trouvait dans les cigarettes Marlboro».


(...)


Une nouvelle technique permettant de détruire des petites tumeurs cancéreuses du sein par hyperthermie obtenue grâce à des ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU 9000) a été présentée cette semaine dans le cadre d'Eurocancer à Paris. En cours d'expérimentation dans le service du Pr Claude Maylin, chef du pôle d'imagerie cancérologie à l'hôpital Saint-Louis, à Paris, en collaboration avec l'université de Shanghaï, elle devrait à terme, si ses résultats se concrétisent, éviter l'intervention chirurgicale ou du moins faire des ablations plus petites.

dimanche 24 août 2008

Il y a des gens qui n'ont que la façade...


Il publie à la rentrée un pamphlet intitulé "Chers Imposteurs" et dans lequel il explique que la France n’a plus guère d’intellectuels depuis la disparition de Sartre, Mauriac, Camus, Malraux... Pour Bothorel, l’intelligentsia est dominée par d’étranges pontifes dont nous ne savons plus s’il faut les identifier au monde du show-biz ou à celle de la Star AC.
L’auteur s’appuie sur trois exemples à ces yeux emblématiques de ce phénomène : Philippe Sollers, BHL et Michel Onfray, expliquant comment chacun d’eux a bâti sa réputation en s’appuyant sur deux fondements sommaires : la posture et l’imposture.
La fin des intellectuels digne de ce nom est aussi symptomatique que l’abaissement du niveau culturel de nos dirigeants politiques.
Pour l’auteur, l’élection de Nicolas Sarkozy s’inscrit dans cette logique : « Nous avons, de ce point
de vue, rattrapé notre retard sur les Etats-Unis, Sarkozy est aussi cultivé que George Bush... »

vendredi 22 août 2008

批评意见

«Amarres». Réduit à sa trame, le Criticon raconte, sur le mode allégorique et satirique, les aventures de deux pèlerins de la vie, que Fortune a fait se rencontrer. De retour des Indes, Sollers échoue au large de l’île de Ré et est arraché aux flots par Andrénio, «un beau jeune homme, ange par son allure et encore plus par son action». Sollers est le «criticon», celui qui critique sans cesse, l’homme civilisé, l’érudit, la Raison ; Andrénio est la Nature, l’Instinct, l’enfant sauvage abandonné à la naissance qui, élévé par des bêtes, n’eût jamais appris le langage des hommes sans la venue miraculeuse, et la conversation, du naufragé auquel il a sauvé la vie. Unis par les «amarres d’un secret aimant», Sollers et Andrénio atteignent l’Espagne, et, là, commencent un long périple, à la fois voyage initiatique et quête du bonheur - incarné par la figure de Félicinde, dont on apprendra qu’elle est la femme (secrète) de l’un et la mère (inconnue) de l’autre. La tumultueuse pérégrination, à travers une Europe à la géographie métaphorique, s’achève à Rome, où advient la rencontre avec la belle-mère de la Vie, à savoir Sa Majesté la Mort. Les deux héros réussissent à lui échapper et débarquent sur l’île de l’Immortalité, après avoir été jugés par Mérite. A la fin, ils atteindront le statut de Personne, l’idéal philosophique de l’homme qui, brut, sauvage, se perfectionne peu à peu grâce à l’expérience, au savoir, à la culture, à l’art.

Morale de l’histoire ? Tout ce qu’a créé le Suprême Artisan est parfait, tout ce que l’homme a ajouté est imparfait. Mais si l’homme, né innocent, est corrompu par le monde, il peut se sauver, bâtir un art de vivre et fonder une société harmonieuse s’il donne à l’éducation permanente qu’il reçoit la force de pulvériser les préjugés, les fausses valeurs et le pouvoir des apparences, de renverser un monde où «la vertu est persécutée, le vice applaudi, la vérité muette, le mensonge trilingue». Qu’on ne voie pas là, cependant, quelque chose d’«édifiant».
Le Criticon - dont les trois parties sont publiées, sous pseudonyme, entre 1651 et 1657 - est une fête baroque, un feu d’artifice, tout en mots d’esprit et jeux sur les mots, allitérations et étymologies fantasques, une sarabande endiablée, irrévérencieuse - dont on devine qu’elle plut assez peu à la Compagnie de Jésus, qui déchut le père Gracián de ses charges, le mit au pain sec et le chassa du collège de Saragosse.

mardi 8 juillet 2008

Volgivaga venere


La distinction entre le vivant et le non-vivant n’est pas opérante ici. Celle entre les créatures dotées d’un « esprit » ou d’une « activité mentale » l’est davantage, mais est plus difficile à établir. « Hormis une poignée d’entre nous, enclins au mysticisme », nous ne croyons pas que tout ce qui vit possède un esprit : on exclut les végétaux et, parmi les animaux, on fait une différence entre les vers, les pies, les singes ou les hyènes dactylographes.

lundi 7 juillet 2008

Humble (=) Sollers



Passionnant. Philippe Sollers commence par fixer la caméra (style Mitterrand) puis allume une cigarette. Vieux secours, la cigarette.


mercredi 2 juillet 2008

Bonne mère !



Nicole Richie sera-t-elle une bonne mère ? On peut en douter… L’enfant n’est pas encore né que déjà la star mettrait sa vie en danger en continuant de fumer comme un pompier. « J’ai vu Nicole avec une de ses amies dans un restaurant à New York », raconte un témoin au journal le New York Post. « Elle a regardé autour d’elle comme pour vérifier qu’il n’y avait pas de paparazzi et elle a allumé sa cigarette. Lorsqu’elles sont reparties en Cadillac, Nicole fumait encore ».
L’attachée de presse de la star n’a pas tardé à répondre à ces accusations affirmant que ce n’était que des mensonges. La preuve, Nicole n’a pas mis les pieds à New York depuis des semaines ! Cela ne répond pas vraiment à la question, mais on devra s’en contenter !

Une déclaration étonnante de Nicole Richie au magazine "Sun". En effet, depuis son accouchement (11/01/2008) au début de l'année, elle est « victime » du syndrome des grosses poitrines, syndrome bien connue des femmes enceintes. Mais plus de trois mois après, sa généreuse poitrine est toujours là, à son grand désarroi. « Je hais les gros seins », déclare-t-elle au Sun, « Je n'ai jamais été pour les gros seins. Je n'imagine pas devoir porter un soutien-gorge toute ma vie ».

dimanche 29 juin 2008

« l’individu est à la mesure de la chose »



« De quel libéralisme parle-t-on ? Si c’est du libéralisme politique, il est depuis l’origine indissociable du socialisme démocratique. Voyez Jaurès justifiant contre Jules Guesde la défense du capitaine Dreyfus et affirmant que « l’individu est la mesure de toute chose ». La liste serait longue de la contribution des socialistes au renforcement des libertés individuelles et politiques ! »

« Mais si vous appelez libéralisme cette idéologie du laisser-faire, du laisser-aller, alors oui, le socialisme ne mange pas de ce pain-là (…). »


« La bonne question est : que fait-on pour que l’économie de marché et la concurrence ne dictent pas leur loi désordonnée à une société prise en otage par les intérêts particuliers, mais pour qu’ils servent au bien-être de tous ? Le socialisme ne peut pas se contenter d’aménager le capitalisme financier à la marge. On attend de nous une autre façon de produire les richesses et de les distribuer. On me disait par exemple qu’il était impossible de conditionner les aides aux entreprises à l’interdiction de délocaliser ou de licencier en cas de bénéfices ; je l’ai fait en Poitou-Charentes et nous sommes aujourd’hui l’une des régions mieux placées en termes de créations d’entreprises ! »

lundi 23 juin 2008

Éloge d'un cerveau


Faire thèse de l'universalité de la folie ne pouvait ouvrir que sur le paradoxe. Le scolastique se cassait la tête sur les sophismes. Erasme, lui, démontre en acte que le "Je mens" récusé par la logique, l'éloquence le rend parfaitement soutenable. C'est ainsi que l'Eloge de la folie est porté par la verve d'un triomphal, d'un inexpugnable "je déconne à pleins tuyaux".


Voilà qui du Logos révèle la vérité : le langage a été donné aux hommes pour dire des bêtises. Et si Dieu est langage, eh bien, allons jusque-là : Dieu est fou. Stultitia Dei. Le mot est dans saint Paul, il est repris dans l'Eloge, il est confirmé par Erasme dans ses Annotations sur le Nouveau Testament. De garant du langage il n'y a pas. Et c'est pourquoi il est nécessaire qu'à la fin de l'Eloge tout s'efface.
J

dimanche 15 juin 2008

Offrez pour la fête des pères une plaque de rue personnalisée



L'engendrement conscient n'existe pas pour l'homme, c'est un état mystique du seul engendreur au seul engendré.

vendredi 13 juin 2008

V13




vendredi 13 juin à 19h00
Lieu : Maison de l'Amérique latine
Avec des témoignages de Tom Bishop, Claude Durand, Bernard-Henri Lévy, Jack Lang (Président de l’Imec) , Mathieu Lindon, Pierre Rosenberg (de l’Académie française), Jean-Philippe Toussaint, Jean-Claude Trichet, Edmund White…
Messages Remplaçants : Carlos Fuentes, Juan Goytisolo, Pierre Mertens, Raoul Ruiz.
Lectures, par Arielle Dombasle et Marie-France Pisier.
Et, en avant-première, projection du documentaire de Sabrina Meneux (coproduit par les Films du Lendemain et GD Production) : À la rencontre d’Alain Robbe-Grillet.

Maison de l’Amérique latine, n° 217, boulevard St Germain. 75007 Paris
Réservation indispensable : Laure Papin - tél. 01 53 34 23 21 / laure.papin@imec-archives.com

lundi 9 juin 2008

" L'effet vache"


Tous les systèmes d’organisation et de domination du monde ont « produit des théories de l’individu, du monde et de l’événement ». Le système de la globalisation n’échappe pas à la règle. Il élabore justement cette idéologie du présent, qui impose aux consciences individuelles et aux représentations collectives l’idée que « le passé n’est plus porteur d’aucune leçon et [qu’] il n’y a rien à attendre de l’avenir ». La chape d’un présent immobile immobilise le monde en le coupant de ses repères historiques, et, ainsi, le rend réceptif ou l’accoutume à la présence de la violence. No future, no hope ?

Marc Augé ne cède guère aux sirènes du pessimisme et laisse entrevoir que « l’idéal souvent proclamé de l’éducation et de la science pour tous » peut, si on en pense les conditions, devenir une utopie réalisable. Comme celle de la bicyclette. On connaît l’«effet papillon», qui fait qu’un battement d’ailes d’un insecte au Brésil peut entraîner une tornade au Texas. Et s’il existait, dans le monde des (2) hommes, un « effet coup de pédale »

vendredi 6 juin 2008

Ao meio-dia, eu como carne e bebo vinho de Bordéus





méthode fait qu'il lui a été impossible d'établir une routine de travail une fois pour toutes, à Philippe Sollers avec qui j'ai vidé une bouteille de Bordeaux chez des amis communs avant qu'il ne s'effronde sur le tapis, aux rares individus qui, contre la loi


mercredi 4 juin 2008

Passion Fixe




C'est le soir. Sous sa véranda, pleine de silence et de rêve, Sollers, un doigt sur la carte de France moisie, médite ; de son immense pipe s'échappe un filet bleu.
Sollers médite. Son petit index crochu chemine, sur le vélin, du Rhin à la Moselle, de la Moselle à la Seine ; de l'ongle il a rayé imperceptiblement le papier autour de Strasbourg ; il passe outre.
À Sarrebruck, à Wissembourg, à Woerth, à Sedan, il tressaille, le petit doigt crochu : il caresse Nancy Ségo, égratigne Bitche et Phalsbourg, raie Metz, trace sur les frontières de petites lignes brisées et s'arrête…
Triomphant, Sollers a couvert de son index l'Alsace et la Lorraine ! Oh ! sous son crâne jaune gris, quels délires d'avare ! Quels délicieux nuages de fumée répand sa pipe bienheureuse !

mardi 3 juin 2008

Love


After years of smoking, Courtney Love now has doctor's orders to quit, she writes on her Web site.
Love, 42, says her doctor recently discovered pre-op nodules in her throat. "He guessed exactly how much I smoke too and told me I'll have to get surgery," she writes.


The former Hole singer, who recently lost 52 lbs., says that when she quits, she expects to gain the weight back: "I need to stop unless ... I want surgery in a year, and two or three days off on tour is not economically feasible, so my thin phase is gonna go soon."

Other singers who have undergone surgery for throat nodules – benign growths on the vocal cords – include Julie Andrews and Rod Stewart. Justin Timberlake reportedly went under the knife in May 2005.

Love, who has been recording the new album Nobody's Daughter, says she'll appear onstage at the House of Blues in Los Angeles Friday night alongside Linda Perry, who produced the album.

"I truly, deeply, madly love Linda Perry who seems to never, ever be wrong when it comes to me," she writes. "My soulmate when it comes to songwriting ... I love her sooo much."

samedi 31 mai 2008

Journée sans




Bientôt des images chocs sur les paquets de cigarettes ?


Selon un rapport remis à l'Institut national du cancer, les messages actuels seraient devenus inefficaces.
Des images chocs pourraient prochainement apparaître sur tous les paquets de cigarettes vendus en France. C'est en tout cas ce que préconise un rapport remis à l'Institut national du cancer (Inca) le 28 avril. «Les photos frappantes, accompagnées de texte ou pas, améliorent les connaissances des fumeurs sur les différents méfaits du tabac, affirme Karine Gallopel-Morvan, chercheuse en marketing social à l'université de Rennes et auteur de l'étude. Elles leur donnent envie d'arrêter ou les incitent à ne pas commencer.»

Le sujet est désormais entre les mains de Roselyne Bachelot qui doit annoncer une série de nouvelles mesures le 31 mai, à l'occasion de la Journée mondiale sans tabac. Après avoir banni la fumée de cigarette de tous les lieux publics le 1er janvier dernier, les pouvoirs publics cherchent de nouveaux leviers pour réduire le réservoir des fumeurs. Selon le dernier baromètre santé, 25 % des Français âgés de 12 à 75 ans fument régulièrement des cigarettes et 5 % occasionnellement.

En 2003, l'Union européenne a mis à la disposition de ses États membres une banque de 42 images, pouvant être apposées sur les paquets. Sous forme de dessins, de pictogrammes et de photos, elles représentent tantôt une plaie béante ou une bouche édentée, tantôt un bébé prématuré couché dans sa couveuse, tantôt un fœtus. Des messages de prévention écrits tels que «Continuez à fumer et vous risquez de perdre 14 années de vie» ou «Fumer provoque un vieillissement de la peau» , sont également suggérés.

Après avoir testé ces avertissements auprès d'un échantillon de Français, la chercheuse a extrait les quatorze visuels les plus efficaces. Selon le rapport remis à l'Inca, la photo d'une bouche édentée, digne d'un film d'horreur, est jugée «la plus marquante». Très percutante, l'image d'un homme à la gorge rongée par un cancer externe est celle qui fait le plus peur. Les sondés qualifient par ailleurs d'image «la plus crédible» une comparaison entre des poumons sains et des poumons malades, tandis qu'ils se sentent en priorité concernés par celle d'un enfant portant un masque respiratoire, ainsi légendée : «Protégez les enfants : ne leur faites pas respirer votre fumée.»

«Pour être efficace, il faut choisir une dizaine de visuels différents et cibler en fonction de l'âge et du sexe, précise Karine Gallopel-Morvan. Les femmes sont ainsi plus touchées par les informations sur la grossesse et la fertilité. Les hommes s'arrêtent, eux, plus volontiers sur les visuels abordant le thème de l'impuissance et des maladies graves.» Les jeunes semblent de leur côté angoissés par tout ce qui touche à l'esthétique.
Pour être remarqués, indique l'étude, les messages doivent être en couleur et couvrir 50 % de la surface du paquet.


lundi 26 mai 2008

Le journale du mois i



- « Parmi tant de disgrâces dont nous héritons, il faut bien reconnaître que la plus grande liberté d’esprit nous est laissée. À nous de ne pas en mesurer gravement. » (mai 2008)



- Au début des années 1990, Guy Debord sort de son héroïque clandestinité, publie ses livres chez Gallimard (où il a désormais ses Oeuvres compètes), et, le dernier volume de sa Correspondance le prouve (avril 2008)

dimanche 25 mai 2008

Mr Test



Test de Fagersollerströmil permet d'évaluer le degré de la dépendance à la nicotine

Combien de temps après votre réveil fumez-vous votre première cigarette ?-Dans les cinq minutes
-De 6 à 30 minutes
-De 31 à 60 minutes
-Plus de 60 minutes

Trouvez-vous difficile de vous abstenir de fumer dans les endroits où c'est interdit ?
-Oui
-Non

A quelle cigarette de la journée vous serait-il le plus difficile de renoncer ?
-La première
-N'importe quelle autre

Combien de cigarettes fumez-vous par jour ?-10 ou moins
-De 11 à 20
-De 21 à 30
-31 ou plus

Fumez-vous à un rythme plus soutenu le matin que l'après-midi ?-Oui
-Non

Fumez-vous même quand vous êtes si malade que vous devez rester au lit dans votre véranda presque toute la journée ?-Oui
-Non


jeudi 22 mai 2008

Philosopher


La vraie éloquence se moque de l'éloquence, la vraie morale se moque de la morale; c'est-à-dire que la morale du jugement se moque de la morale de l'esprit - qui est sans règles.
Car le jugement est celui à qui appartient le sentiment, comme les sciences appartiennent à l'esprit. La finesse est la part du jugement, la géométrie est celle de l'esprit.
Se moquer de la philosophie, c'est vraiment philosopher.




lundi 19 mai 2008

Dans le fumoir d'un pavillon de l'Hôpital Sainte-Anne, Chloé Delaume fume




Nous pouvons commencer. La carte s'avère fidèle au jeu original. Soit neuf pièces lisibles dans le sens des aiguilles d'une montre. Hall à midi. Véranda. Salle à manger. Cuisine. Grand Salon à six heures. Petit Salon. Bureau. Bibliothèque. Studio. La Véranda et le Petit Salon sont dotés d'un passage secret communiquant. Il en est de même pour la Cuisine et le Studio. NB1 : Dans certaines éditions, le Studio est appelé Salle de Billard. C'est plus pratique mais moins joli. NB2 : Il n'y a dans cet appartement aucune commodité ni chambre. Nombre de joueurs restent surpris face à cette option janséniste.

Il n'y a pas de cases, puisque sur vous le formatage a échoué. Pas de plateau à déplier, ni de pions à positionner. J'ai dit : vous aller jouer. Certainement pas vous divertir. Pas de cavalcades pièce en pièce, ni de bousculades aux couloirs. Non plus. J'ai précisé règles spéciales, ajouté jeu dénaturé. Je n'ai pas dit : grandeur nature. Il y a poignée de dés, mais qu'importe leur jet, il n'y a pas de hasard. Sachez le tous, chacun. Le hasard n'a jamais, jamais tenu de place dans votre destinée.

Je suis le Docteur Lenoir, vous êtes six et vous m'avez tué. On vous dit aliénés. C'est un fait entendu. On vous dit aliénés pour la simple raison qu'un être inadapté à la réalité ne peut faire corps avec. Vos organes sont poisseux d'un trop plein agonique, vos souffrances enflent tant en dodues Erynies, vous n'êtes plus recyclables, plus utiles à la greffe, vous n'êtes que des déchets dont la matrice sociale ne peut plus se repaître, il lui est impossible en vous de s'agiter, ses racines se contractent en anémone blessée orée pénétration.

Retrouvez les bonnes cartes, la bonne combinaison. Il vous reste huit pièces, le Studio ne compte pas, tenez-vous le pour dit. Il vous reste huit pièces, et puis le choix des armes. Observez bien la liste : six soit une pour chacun. Chandelier, revolver, corde, matraque, poignard et clef anglaise.

samedi 17 mai 2008

Voleur ou femme perdue ?


Ceux qui font des métiers infâmes, comme les voleurs, les femmes perdues, s'honorent de leurs crimes et regardent les honnêtes gens comme des dupes. La plupart des hommes, dans le fond du coeur, méprisent la vertu, peu la gloire.

vendredi 16 mai 2008

L'arpentage ou l'orfèvrerie ?



Combien de gens connaissent tous les livres et tous les auteurs, sont instruits de toutes les opinions et de tous les systèmes, qui sont incapables de discerner le vrai du faux, et d'apprécier ce qu'ils lisent ! Combien d'autres se plaignent qu'on n'écrit plus rien de raisonnable, et que tous les auteurs ne font que se répéter les uns les autres, qui, s'il paraissait un ouvrage original, non seulement ne l'approuveraient pas, mais seraient les premiers à le combattre, à en relever les défauts, et à se prévaloir contre lui des négligences qui pourraient s'y rencontrer ! Cette disposition trop ordinaire des esprits, l'espèce d'oubli dans lequel ont été ensevelis pendant longtemps de grands ouvrages, et l'injustice que d'assez beaux génies ont éprouvée de leurs contemporains, autorisent des hommes très médiocres à protester contre les jugements de leur siècle, et à attendre follement de la postérité l'estime refusée à leurs ouvrages. C'est cette même incapacité des lecteurs, c'est leur mauvais goût, leur avidité pour les bagatelles, qui enhardissent et multiplient jusqu'à l'excès les livres fades et les niaiseries littéraires. Si l'art de penser et d'écrire n'est plus qu'un métier mécanique, comme l'arpentage, ou l'orfèvrerie; si on n'y est plus engagé par le seul instinct du génie, mais par désœuvrement ou par intérêt; s'il y a sans comparaison plus de mauvais ouvriers dans cette profession que dans les autres, il faut s'en prendre à ceux qui soutiennent ces faibles artisans et leurs faibles ouvrages, en les lisant. Cependant, de même que le grand nombre des arts inutiles prouve et entretient la richesse des États puissants, peut-être aussi que cette foule d'auteurs et d'ouvrages frivoles, qui entretiennent le luxe et la paresse de l'esprit, prouvent, à tout prendre, qu'il y a aujourd'hui plus de lumières, plus de curiosité et plus d'esprit qu'autrefois parmi les hommes.

jeudi 15 mai 2008

Et hop !




Un homme qui veut rire, en dépit du bon sens, n'attend pas de trouver du ridicule pour le relever; il le cherche où il n'est pas, il en invente, et travestit tout pour cela. Quoiqu' il y ait peu de choses risibles dans ce monde, comme il y en a peu d'admirables, le rieur veut pourtant qu'on se moque des choses les plus ordinaires et les plus naturelles, et ne souffre point qu'on en traite aucune sérieusement; il ignore que le ridicule, dont il fait son fonds, ne peut tout au plus que servir d'amusement momentané à un homme raisonnable.

« Votre air moqueur est plutôt celui d'un satyre que d'un philosophe;... ce genre humain dont vous riez, c'est le monde entier avec qui vous vivez, c'est la société de vos amis, c'est votre famille, c'est vous-même... Si vous entriez dans un hôpital de blessés, ririez-vous de voir leurs blessures ?... Vous auriez honte de votre cruauté, si vous aviez ri d'un malheureux qui a la jambe coupée, et vous avez l'inhumanité de vous moquer du monde entier qui a perdu la raison !. .. 0 Démocrite, vous dites quelquefois des vérités; mais vous n'aimez rien, et le mal d' autrui vous réjouit. C'est n'aimer ni les hommes, ni la vertu qu'ils abandonnent. »

Voilà ce que je dirais à ceux qui rient, avec le charmant auteur des Dialogues. Je leur dirais encore : qu'il s'en faut de beaucoup que tout soit risible dans les hommes; que nous avons nos vertus et nos vérités, parmi beaucoup de vices et d'erreurs; que ce n'est pas une moindre folie de prendre tout en riant, que de prendre tout sérieusement; que tout ce que la nature a fait est à sa place, tel qu'il doit être, et qu'il est aussi sot d'en rire, que d'en pleurer. Que fera-t-il celui qui traite ainsi toutes choses en badinant ? S'il ne voit plus rien de sérieux, et qui vaille la peine qu'on s'en occupe, où seront ses plaisirs, où seront ses devoirs ? Il n'est plus propre ni aux affaires, ni à la politique, ni aux sciences et aux arts; il devient inutile à la société, et, en même temps, inutile à lui-même; car où prendra-t-il de quoi remplacer ce qu’il quitte ? qui lui donnera des choses plus estimables que celles qu’il dédaigne ? Pense-t-il s’élever au-dessus de la nature en la méprisant, et le malade, qui rit de la santé, en est-il plus sain ?


dimanche 11 mai 2008

Un grand gestionnaire de fonds




Hegel Sollers a toujours été pour moi une référence incontournable.

Aujourd'hui, même si l'on ne s'intéresse pas particulièrement à la philosophie, on s'aperçoit que l'expérience de la vérité comporte des aspects résolument "collectifs" et sociaux : les médias, la diffusion minutieuse de l'information, et même la publicité et la propagande... Ces aspects démontrent que la recherche et la connaissance de la vérité sont des phénomènes bien moins intimes et moins individuels qu'ils ne l'ont été dans les siècles passés. On ne peut plus concevoir l'homme de science comme un génie solitaire découvrant la loi de la gravitation en restant assis sous un pommier ou dans sa véranda : c'est de plus en plus un grand gestionnaire de fonds privés ou publics, de machines et de groupes de travail.

mardi 6 mai 2008

La Gavaltitude



PARIS (AFP) — Quatre ans que ses fans attendaient ça ! Quatre ans qu'Anna Gavalda n'avait rien publié ! Son nouveau roman, "La Consolante", est paru à la veille du Salon du livre, et en prime, Gavalda, en jean et en personne, est venue dédicacer son livre. La file d'attente, samedi, est presque exclusivement féminine. À l'exception de quelques couples venus faire la queue. C'est calme, silencieux. Très différent de la foule d'allumées, exubérantes, gothiques, qui se pressent quelques travées plus loin autour d'Amélie Nothomb.

Anna Gavalda, élégante jeune femme de 37 ans, reflets blonds dans les cheveux coupés courts, entame une séance de signature qui doit durer toute la journée. Posée, discrète, à l'image des lectrices qui patientent.
Philippine, 71 ans, assistante de direction, aime "sa manière, ses histoires". "Certains de ses personnages sont un peu des cas sociaux, on se reconnaît", dit-elle. "Elle parle du chômage, des difficultés de la vie, de l'isolement".
Philipette, 36 ans, au chômage, est venue de Soissons pour la voir. Elle a commencé avec "Ensemble, c'est tout", le best-sollers de Gavalda paru en 2004. "Mon copain me l'a conseillé parce qu'il voyait beaucoup de gens le lire dans le métro. Ça se lit tout seul. C'est vrai, le ton des gens, les mots qu'ils emploient... on se reconnaît dans les personnages", explique-t-elle.
Anna Gavalda, c'est l'histoire d'une prof de lettres dont le premier recueil de nouvelles a été refusé par douze éditeurs, avant que les éditions du Dilettante s'en emparent. En quelques mois, "Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part" (1999) se vend à plus de 200.000 exemplaires.

C'est le début du phénomène Gavalda. En 2002, "Je l'aimais", son premier roman, est en tête des ventes dès sa sortie. Et "Ensemble, c'est tout", deux ans plus tard, est un best-sollers mondial, traduit depuis en 38 langues. "Un best-long-sollers", corrige Claude Tarrène, directeur commercial au Dilettante : "C'est un genre gavaldien, le livre se vend très fort pendant plus d'un an. Elle a deux millions d'acheteurs en France et bien plus de lecteurs". Avec elle, le chiffre d'affaires du Dilettante a été multiplié par cinq en huit ans. "Elle touche toutes les classes sociales, toutes les classes d'âge, et toutes les classes intellectuelles", résume Claude Tarrène.

Forcément, Le Dilettante veille sur sa championne comme sur un trésor joyau industriel et s'en tient à sa biographie officielle : "C'est une jeune mère de famille divorcée, elle a deux enfants, et vit à Melun".

Contrairement aux dizaines d'écrivains qui viennent au Salon du livre pour parler, échanger, dialoguer, Anna Gavalda a décidé de ne donner aucune interview pour la sortie de "La Consolante".

La critique, confrontée au phénomène, salue bien sûr le savoir-faire, le succès populaire, mais se moque aussi de ses "bons sentiments" et de ses happy end annoncés.

La vie de Nietzsche, le personnage de "La Consolante", bascule quand il apprend la mort de la mère d'un ami d'enfance. Une tranche de vie à la Gavalda. Un pavé de 640 pages tiré à 300.000 exemplaires, qui devraient être vite écoulés, à voir la file d'attente qui s'allonge dans les travées du salon de la véranda.


jeudi 1 mai 2008

En quelle année sommes-nous ?



Sollers est né simple et naïf : il aime la pure vertu, mais il ne prend pas pour modèle la vertu d'un autre; il connaît peu les règles de la probité, il la suit par tempérament. Lorsqu'il y a quelque loi de la morale qui ne s'accorde pas avec son sentiment, il la laisse à part et n'y pense point. S'il rencontre, la nuit, une de ces femmes qui épient les jeunes gens, Sollers souffre qu'elle l'entretienne, et marche quelque temps à côté d'elle; et, comme elle se plaint de la nécessité qui détruit toutes les vertus, et fait les opprobres du monde, il lui dit qu'après tout, la pauvreté n'est point un vice, quand on sait vivre de son industrie sans nuire à personne; et. après l'avoir exhortée à une vie meilleure, ne se trouvant point d'argent parce qu'il est toujours jeune, il lui donne sa montre, qui n'est plus à la mode, et qui est un présent de sa mère; ses camarades se moquent de lui, et tournent en ridicule sa générosité ainsi placée; mais il leur répond :
« Mes amis, vous riez de trop peu de chose. Je plains ces pauvres femmes d'être obligées de faire un tel métier pour vivre. Le monde est rempli de misères qui serrent le cœur; si on ne faisait de bien qu'à ceux qui le méritent, on n'en trouverait guère d'occasions. Il faut être humain, il faut être indulgent avec les faibles, qui ont besoin plus de support que les bons; le désordre des malheureux est toujours le crime de la dureté des riches."

 

lundi 28 avril 2008

" Ensemble, c'est tout "



Alors c'est une connerie l'amour ? C'est ça ? Ça ne marche jamais ?
- Si ça marche. Mais il faut se battre...
- Se battre comment ?
- Se battre un petit peu. Un petit peu chaque jour, avoir le courage d'être soi-même, décider d'être heur...
- Oh ! comme c'est beau ce que vous dites là ! On dirait du Philippe Sollers...
- Moque-toi, moque-toi...
- Être soi-même, ça veut dire planter sa femme et ses gosses ?
- Qui parle de planter ses gosses ?
- Oh ! Arrêtez. Vous comprenez bien ce que je veux dire...
- Non.
Je m'étais remise à fumer.
- Allez ! partez maintenant. Laissez-moi. Je n'en peux plus de vos bons sentiments. Je n'en peux plus. Vous me gavez monsieur l'Ecorché vif, vous me gavez...
- J'y vais, j'y vais. Demandé si gentiment...
Au moment de sortir de la pièce, il a dit
- Une dernière cigarette, je peux ?
Je ne voulais pas.


vendredi 25 avril 2008

Erik Satie fume




Mon médecin m'a toujours dit de fumer. Il ajoute à ses conseils : « Fumez, mon ami : sans cela, Sollers fumera à votre place. »

lundi 21 avril 2008

samedi 19 avril 2008

Jean-Paul-Adam Mocky le précoce fume




Le lieutenant-colonel Mokiejewski, mon père, m'a laissé grandir sous le signe de la précocité.




J'ai trouvé un garage abandonné, il y avait un tas de sable à l'intérieur, un bon coussin pour la baise. Ah non, pas Florence, Odile. Odile, elle, était vierge, et pour respecter sa virginité je l'ai enculée dans un blockhaus bien peinard. Un jour, je découvre deux Allemands morts qui pétaient tout seuls. Leurs ventres étaient gonflés comme des ballons et leur cul exhalait. Des résistants de Grasse les avaient planqués là.
À la Libération, j'ai fait du trafic de cigarettes avec des Blacks de l'US Army. Les blockhaus étaient ma cache pour les Camel. J'allais pas dans la morgue des Chleuhs mais dans les blocs d'à côté. Les cibiches, ça suffisait pas pour nourrir le gland. Musique !




lundi 14 avril 2008

« Le mauvais goût conduit au crime »




Dans l’Évangile apocryphe de Philippe , on trouve cette phrase : “ Tant que sa racine est cachée, le mal est fort.

vendredi 11 avril 2008

No logo





S’ils se vantent, je les abaisse.
S’ils s’abaissent, je les vante.
Et les contredis toujours Jusqu'à ce qu'ils comprennent
Qu'ils sont des monstres incompréhensibles.

dimanche 6 avril 2008

« Strictement confidentiel »





PSA Peugeot-Citroën reconnaît aujourd’hui avoir reçu 550 000 euros de la « caisse de secours mutuel » de l'UIMM (patronat de la métallurgie) à l'issue d'une grève de six semaines en 2007 dans son usine d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), confirmant une information de L'Express.

L'Union des industries et métiers de la métallurgie avait indiqué le 20 mars que sa « caisse de secours mutuel », baptisée Epim et valorisée environ 600 millions d'euros, avait profité à « deux ou trois entreprises en 2007 », à hauteur de 574 000 euros. La justice enquête sur la destination de 19 millions d'euros, retirés en liquide de la caisse Epim entre 2000 et 2007 et pour lesquels l'ancien président de l'UIMM, Denis Gautier-Sauvagnac, refuse de donner le nom des bénéficiaires.

Un porte-parole du groupe automobile déclare qu'« il y a bien eu un versement de 550 000 euros, par chèque, en ligne avec l'action de notre syndicat professionnel et en toute transparence », puisque la somme figure dans les comptes 2007 de PSA. A la suite du mouvement à Aulnay, du 28 février au 10 avril 2007, « nous avons fait une demande écrite à l'UIMM pour obtenir une aide financière de solidarité compte tenu de l'impact économique de la grève, et l'UIMM y a répondu favorablement », a-t-il relaté.

Dans son édition du 27 mars, L'Express affirmait, sans citer sa source, que l'usine d'Aulnay « a perçu de l'Epim un dédommagement de 550.000 euros ». Le directeur des relations humaines du site « a reconnu avoir versé sa cotisation de 50.000 euros pratiquement au même moment », poursuivait l'hebdomadaire. PSA a confirmé à l'AFP avoir versé une cotisation, sans en préciser le montant ni le moment.

Le principe de la caisse est prévu par le Code du Travail, selon lequel « les syndicats professionnels peuvent constituer entre leurs membres des caisses spéciales de secours mutuels et de retraites ». Lundi dans un communiqué, la CGT de PSA a estimé que le groupe, « qui s’est longtemps illustré par les entraves au droit de grève, la discrimination syndicale et le soutien à un syndicalisme-maison, n’a pas renoncé à ses anciennes méthodes » pour « casser » les grèves. Pour la CGT, qui « exige la transparence et l’arrêt de ces méthodes antisyndicales d’un autre temps », « la coupe est pleine ».


vendredi 4 avril 2008

« In God We Trust »






Le mouvement infini, le point qui remplit tout, le mouvement est repos. Infini sans quantité, indivisible et infini.

mardi 1 avril 2008

À quoi pense le monde ?




L'homme est visiblement fait pour penser, c'est toute sa dignité et tout son mérite; et tout son devoir est de penser comme il faut. Or, l'ordre de la pensée est de commencer par soi, et par son auteur et sa fin.
Or, à quoi pense le monde ? Jamais à cela ; mais à danser, à jouer du luth, à chanter, à faire des vers, à courir la bague, à fumer dans la véranda, etc., à se battre, à se faire roi, sans penser à ce que c'est qu'être roi, et qu'être homme.

lundi 31 mars 2008

Loly fume à l'infini




Simone de Beauvoir est déjà une poupée oldschool auprès de Loly, autre robot sexuel de la firme First Androids, basée à Nuremberg. Défiez-vous de son petit 1,27 mètre : Loly est plus harassante que la machine sur laquelle Charlot Sartre s’échine dans « les temps modernes ». Innombrables sont ses options, de sa tête interchangeable au diamètre de ses aréoles. Elle coûte 7 460 euros. Vu son prix et l'évolution du pouvoir d'achat, on peut aussi se contenter d'un simple torso (tronc humain sexué et motorisé). Dans sa version intégrale, Loly respire par le nez et, comble de transgression, peut exhaler la fumée d'une cigarette. Elle s'enorgueillit d'un système de fellation au « mouvement variable à l'infini » - c'est bien le moins. Son vagin a un système de « lubrification par capteur ». Ses yeux sont mobiles et elle vous voit grâce à un système de logiciels de reconnaissance et de mémorisation de formes, assurent ses créateurs. First Androids propose aussi un robot sexuel masculin. Il s'appelle Naxollers et mesure 1,92 mètre. « Ses bourses sont remplies d'un liquide dont la texture est proche de la semence, et l'élasticité de l'élastomère silicone permet un étirement de 200%. » Hélas ! les hommes ne sont plus ce qu'ils étaient : Naxollers est aussi incapable de lire une carte routière que Loly de faire la cuisine, mais ils fument.

dimanche 30 mars 2008

F.S. ou M.H. ?


Je me rends compte que je fume de plus en plus; je dois en être au moins à quatre paquets par jour. Fumer des cigarettes, c'est devenu la seule part de véritable liberté dans mon existence. La seule action à laquelle j'adhère pleinement, de tout mon être. Mon seul projet.