samedi 24 novembre 2007

Alina Reyes préfére parler aux Oiseaux






Je fume une cigarette, écrase un mégot marqué de rouge à lèvres, par-delà le bruit énorme du trafic discerne le chant des oiseaux, là-bas un merle, les flopées d'air frappé par leurs ailes... Il existe une langue des oiseaux, une langue qui dit autre chose que ce qu'elle dit, où l'on peut entendre dans « voici un message secret disant les mots », « vois si un mets sage se crée, dit sans les mots », ou bien « dans l'essence de l'être », « les sens de lettres »... Mon amour, mon très beau, mon merveilleux manipulateur de plume, c'est la langue que tu me parles... la langue qu'employaient les alchimistes pour n'être compris que des saints, des sages et des âmes douées d'intelligence... Partout où tu peux écrire tu me la fais, tu me la parles, et je l'entends, puisque c'est toi... Et je la sens, puisque c'est toi, descendre et monter dans mon corps comme mon inlassable désir de toi...

jeudi 22 novembre 2007

Les prostitueurs de l'art ne fument pas





Les objets produits par l'Atelier viennois restent, aujourd'hui encore, très prisés par les collectionneurs. Un ravisement pour l'oeil, en effet. Mais encore et toujours, la femme sert d'appât. «Voulez-vous un encrier ? Le voici : des naïades se baignent entre deux récifs ; l'un contient de l'encre, l'autre du sable. Voulez-vous un cendrier ? Le voici ; une danseuse serpentine se livre à vos regards et sur ses narines vous pouvez frotter le bout de votre cigare», écrit le sarcastique Adolf Loos. Et il conclut : «Je n'ai jamais aimé cela. Alors les artistes ont protesté : regardez tous, voilà un ennemi de l'art ! Mais c'est le contraire qui est vrai : je voulais protéger l'art contre ceux qui le dénaturent. On m'a sommé d'exposer à la Sécession. Je le ferai si les marchands sont chassés du temple. Les marchands ? Non : les prostitueurs de l'art.»




mercredi 21 novembre 2007

Denis Roche fume, aujourd'hui



Si le silence était comme la charogne, c'est ici que je placerai cette phrase écrite il y a quelques semaines : J'entonne le chant triomphal et ouvrier tandis que de mes doigts tremblants j'entaille enfin le bâti communal du con !


mardi 20 novembre 2007

Sollers entend des voix


Philippe_Sollers

Vers 13 ou 14 ans, comme averti d'un naufrage possible, je prends énormément de photos du Paradis. Je les regarde de temps en temps avec stupeur. Mais oui, c'est bien cette herbe-là, cette sapinette-là, ces fusains-là, ces terrasses-là, ce chat-là en train de se faire les griffes contre un tronc de jeune acacia. Et aussi ces vérandas-là ou j'entends des voix.

jeudi 15 novembre 2007

Sollers voyage autour de sa Véranda



Qu'on n'aille pas croire qu'au lieu de tenir ma parole, en donnant la description de mon voyage autour de ma véranda, je bats la campagne pour me tirer d'affaire : on se tromperait fort, car mon voyage continue réellement, et pendant que mon âme, se repliant sur elle même, parcourait, dans le chapitre précédent, les détours tortueux de la métaphysique, j'étais dans mon fauteuil sur lequel, je m'étais renversé, de manière que ses deux pieds antérieurs étaient élevés à deux pouces de terre; et, tout en me balançant à droite et à gauche, et gagnant du terrain, j'étais insensiblement parvenu tout près de la muraille. C'est la manière dont je voyage lorsque je ne suis pas pressé. Là, ma main s'était emparée machinalement du portrait de madame de Hautetfort, et l'autre s'amusait à ôter la poussière qui le couvrait. Cette occupation lui donnait un plaisir tranquille, et ce plaisir se faisait sentir à mon âme, quoiqu'elle fût perdue dans les vastes plaines du ciel : car il est bon d'observer que, lorsque l'esprit voyage ainsi dans l'espace, il tient toujours aux sens par je ne sais quel lien secret; en sorte que, sans se déranger de ses occupations, il peut prendre part aux jouissances paisibles de l'autre; mais, si ce plaisir augmente à un certain point, ou si elle est frappée par quelque spectacle inattendu, l'âme aussitôt reprend sa place avec la vitesse de l'éclair.
C'est ce qui m'arriva tandis que je nettoyais le portrait.

mardi 13 novembre 2007

Raphaël Sorin fume trop





Je sais depuis longtemps ce qui te tracasse : « Etre Antonin Artaud ou rien. » Egaler Picasso. Ressembler à Mozart. Dépasser Proust. Et Dante ou Homère. En art, une œuvre ne suffit pas, même géniale. Souvent, à un détail près, tu deviens une légende ou reste un quidam. Des légendaires, j’en ai approché : Godard (boyard maïs), Burroughs (imper et galure d’extraterrestre), Gainsbourg (montre Cartier), Hallier (œil de verre), Warhol (perruque blanc et vert), Lebovici (Monsieur Motus). Et Sollers ? J’ai beau chercher, rien. Une des plus belles histoires de culte poussé jusqu’au bout me revient : l’affichiste Savignac raconte que, admirateur et élève de Cassandre, il fumait les mégots du Maître.
Qui fumera les tiens, Philippe ?



dimanche 11 novembre 2007

Michel Onfray ne fume pas



Arrêtons l’hypocrisie ! Lance Armstrong se dopait et il était un grand champion. Jean-Paul Sartre croquait des amphétamines – corydrane - par tubes entiers dilués dans du whisky, avec du tabac pour faire passer le tout, et il écrivait L’Être et le Néant : il n’en reste pas moins dans son genre un champion du Tour de France philosophique dûment estampillé dans les manuels pour classe terminale. BHL, on le sait, porte Sartre en haute estime et l’imite côté amphétamines, il l’écrit dans Comédie et confesse avoir le même fournisseur que Sollers

mercredi 7 novembre 2007

Sollers et son infinie répétition



Philippe Sollers

Assis dans la véranda, nous contemplions le jardin en pleine floraison.

- Là où la nature se répète, dit alors Arthur Schnitzler, nous reconnaissons son infinie variété. Mais quand un écrivain tel que Sollers se répète, nous considérons qu'il a fait son temps. Ce jugement est-il dénué de tout fondement ? Telle la nature, l'écrivain recherche lui aussi la perfection en s'essayant aux mêmes sujets...



dimanche 4 novembre 2007

Rachel Laurent fume





Lorsque Rachel Laurent, havane coincé entre ses longs ongles laqués de rouge, promène dans les vernissages sa dégaine lookée punk-Yohji de « femme chic défroquée », comme elle dit, les hommes s’émeuvent… même Sollers. Quand ils voient son travail, il arrive qu’ils se décomposent. Festins cannibales exquisément composés où des fragments de petits baigneurs nagent dans le ketchup, poupées gonflables disposées dans des ordures ou déguisées en SDF handicapées – stylisme Guerrisold, panneau « J’AI FAIM » authentique racheté à une mendiante yougoslave devant le Bon Marché… « Je ne fais que dans la profanation », tranche Rachel Laurent, en désignant une série d’« autoportraits défoncés » : photos grimées comme si elle avait été victime d’un accident de scalpel, projetées sur du papier froissé puis re-photographiées. « Ça choque beaucoup. Moi, je me trouve ravissante… Cela dit, je n’aurais jamais songé à me photographier si je n’avais pas posé déguisée en Claude Cahun pour Olivier Blanckart. Je me suis vue très laide, et ça m’a débarrassée de l’image de la femme idéale que nous trimballons tous avec nous. Ça a été très libérateur. J’ai perdu mon narcissisme idéal. »