mardi 8 janvier 2008

L'homme (cor)rompu

J’ai attendu l’ascenseur avec eux et je me suis affalée sur le divan dans la véranda. Ce vide, de nouveau… Le bien-être de cette journée, cette plénitude au cœur de l’absence ce n’était que la certitude d’avoir Philippe ici, pour quelques heures. Je l’avais attendu comme s’il revenait pour ne pas repartir : il repartira toujours. Et notre rupture est bien plus définitive que je ne l’avais supposé. Je ne participerai plus à son travail, nous n’aurons plus les mêmes intérêts. Est-ce que l’argent compte à ce point pour lui ? Ou ne fait-il que céder à Julia ? L’aime-t-il tant ? Il faudrait connaître leurs nuits. Sans doute sait-elle combler à la fois son corps et son orgueil : sous ses dehors mondains, je l’imagine capable de déchaînements. Ce lien que crée dans un couple le bonheur physique, j’ai tendance à en sous-estimer l’importance. La sexualité pour moi n’existe plus. J’appelais sérénité cette indifférence ; soudain je l’ai comprise autrement : c’est une infirmité, c’est la perte d’un sens ; elle me rend aveugle aux besoins, aux douleurs, aux joies de ceux qui le possèdent. Il me semble ne plus rien savoir de Philippe. Une seule chose est sûr : combien il va me manquer ! C’est peut-être grâce à lui que je m’accommodais à peu près de mon âge. Il m’entraînait dans sa jeunesse. Il m’emmenait aux Vingt-quatre Heures du Mans, aux expositions d’op-art, et même un soir à un happening. Sa présence agitée, inventive, remplissait la véranda. M’accoutumerai-je à ce silence, à la sage coulée des jours que ne brisera plus aucun imprévu ?




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