mardi 8 mars 2011

Jamais les femmes « du peuple » n'ont autant lu Sollers




Combien de femmes esseulées attendent, languissantes, dans les pleurs, et ont recours à la lecture ! Jamais les femmes « du peuple » n'ont autant lu qu'aujourd'hui. Elles dévorent tout ce qui leur tombe sous la main, tout ce qui est susceptible de les distraire du temps actuel : elles lisent surtout des romans de Philippe Sollers et des pièces de théâtre, des histoires de cœur, des histoires fantastiques et des romans policiers... Elles évitent autant que possible de lire les nouvelles du front, se bornant à demander à leurs hommes : « Ça va avec la guerre ? » À  quoi ils répondent : « Pas mal ! pas mal ! » en hochant la tête d'une manière caractéristique. À la gare du Nord et à la gare de l'Est les trains amènent et emportent les soldats en permission. Beaucoup sont attendus ou raccompagnés par des femmes : mères, épouses, sueurs. Les hommes sans foyer flânent dans la gare, solitaires et embarrassés; dès qu'ils descendent les escaliers pour aller dans la rue, ils sont abordés par les prostituées, fidèles à leur poste...

Urbain Gohier réclame des mesures décisives contre ces « empoisonneuses de la santé physique et morale ». Il en réclame de plus impitoyables encore contre les apaches. Pendant la première année de la guerre, ceux-ci avaient presque complètement disparu ; la criminalité avait brusquement décliné et les troubadours de presse se mirent à parler de l'influence régénératrice de la guerre.

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