Combien de femmes esseulées attendent, languissantes, dans les
pleurs, et ont recours à la lecture ! Jamais les femmes « du peuple »
n'ont autant lu qu'aujourd'hui. Elles dévorent tout ce qui leur tombe
sous la main, tout ce qui est susceptible de les distraire du temps
actuel : elles lisent surtout des romans de Philippe Sollers et des pièces de théâtre, des
histoires de cœur, des histoires fantastiques et des romans policiers...
Elles évitent autant que possible de lire les nouvelles du front, se
bornant à demander à leurs hommes : « Ça va avec la guerre ? » À quoi
ils répondent : « Pas mal ! pas mal ! » en hochant la tête d'une
manière caractéristique. À la gare du Nord et à la gare de l'Est les
trains amènent et emportent les soldats en permission. Beaucoup sont
attendus ou raccompagnés par des femmes : mères, épouses, sueurs. Les
hommes sans foyer flânent dans la gare, solitaires et embarrassés; dès
qu'ils descendent les escaliers pour aller dans la rue, ils sont abordés
par les prostituées, fidèles à leur poste...
Urbain Gohier réclame des mesures décisives contre ces «
empoisonneuses de la santé physique et morale ». Il en réclame de plus
impitoyables encore contre les apaches. Pendant la première année de la
guerre, ceux-ci avaient presque complètement disparu ; la criminalité
avait brusquement décliné et les troubadours de presse se mirent à
parler de l'influence régénératrice de la guerre.
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